vendredi 29 avril 2016

290416


parce qu'il s'agit d'un poème au fond
tu l'as compris que cette chair parlait en signes
dans l'instant des bouches se perd, s'échoue plutôt
sur chaque rivage présent,
& qu'il faut rejoindre le cœur, saisir à pleines mains la pioche,
aller à la mine,
creuser le ventre de l'obscur pour risquer de trouver –
quoi ? ceci que je remonte à la lumière
sans être sûre de comprendre sans savoir si tu acceptes le partage
(les clefs sont ailleurs)
en risquant tout en risquant de construire
la vie sur des chimères mais elles peuplent chaque part d'univers
& comment vêtir les chimères autrement que d'un grand amour –
son inverse trouble, d'un acte de foi je l'écarte –
pour continuer de ne pas répondre à cela
voudrais-tu avec moi rejoindre la mine & sa promesse de prunelle 
 


mercredi 27 avril 2016

280416


la matière éclairée d'un acte de
foi je sais : rien en haut rien en bas trismégiste
révèle au néant son savoir & le miracle & la seule chose
qui est peut-être que je parle ce soir à ça qui ne m'entendra pas
mais cette nature est autre & brûlante – on se consume sans comprendre –
acte porté par l'articulation des langues & des têtes
foi ayant déjà déplacé des montagnes renversé de grands pouvoirs
& même ayant pu te dire je t'aime en confirmant de l'entièreté du corps
le mot à moins que ce ne fut l'inverse
que cela ne soit que cela ne sera 
 

mardi 26 avril 2016

270416


des jardins étroits corps laminés de vieilles femmes
hanches usées mais fleuries
le printemps s'invente des courbes
tulipes magnolias muscaris
opartoutprimevères
murs rapiécés sous l'éternité vague                           ton regard je ne saurais
dire de quel ciel profond il est fait la nuance est cruelle
trop véloce & les mots avec leur pente d'immobiles
leur gouffre d'immédiat crient sans jamais saisir ce que partout le monde ajoute & chante
on était partis
outre cousue de peur que le naufrage emporte ce qu'il reste de corps
les secousses votives du bitume ont tranché chaque couture & voilà :
nous sommes
& je t'aime dans l'espace du retour où sur les faces s'esquissent des formes
finalement très proches
opartoutprimevères
de la plus simple des simples

dimanche 17 avril 2016

170416


...
On est restés muets quand on s'est aperçus de la chose. D'abord la douleur atroce. Là, on a crié mais déjà ça n'avait plus le goût d'un cri d'homme. Quelque chose de terre & de foin.

& puis la douleur, c'est comme si elle se faisait au corps nouveau qui poussait. Toujours présente mais se baladant dans des endroits étranges du cerveau, & surtout, nue, sans sa traîne de pensées. Brute, droite, franche comme jamais avant, ni depuis.

La conscience s'est affadie, je dis affadie, parce que tu comprends, depuis on est revenus hommes, mais peut-être que ce n'était pas ça, peut-être qu'elle se diluait dans la matière, une conscience entière, pas morcelée, tu vois, inséparable, mais on est revenus hommes, on ne sait plus très bien.

Affadie, de loin, ça me paraît juste.

On est restés muets. On avait même pas l'idée de parler. Dans la tête ça allait très vite, des milliers de sensations, des milliers d'événements & on sentait bien que ça fusait dans des milliards de globes mais, pas un mot, la patte avançait, la peau frissonnait, l'oreille se dressait, faisait sa conque réceptrice, faisait le boulot, parfaitement. Le groin grognait. & tu vois, c'est pas qu'on ne pouvait plus, ou qu'on n'en avait plus envie, c'est qu'on n'en avait même pas l'idée, de parler. On entendait de loin des discours, ceux qui se battaient encore, ceux qui triomphaient bruyamment, en gros ça paraissait être les mêmes formes, mais on ne peut pas dire, puisqu'on était pas encore revenus hommes, tout arrivait sur nous en masse indistincte, & on ne pouvait pas... mais je me répète, pardonne-moi. 
... 

samedi 16 avril 2016

160416


alors c'est ça Circé
reine des métamorphoses
floraison blanche sur l'île ouverte – nectar de glaise
il suffit de croire & croire est la plus abrupte des rencontres
aucun pouvoir pouvoir pouvoir
mot martelé — fécondé sans substance – aucun / les plantes s'offrent les poisons choisissent la délicieuse victime
tout se répartit selon les lois invisibles
au cœur aucune vérité au cœur cal clair
ici – quoi ? – ici quoi qu'il en est de l'acte ?
ici parler dans la langue du faire tâter du lieu avec la pâte molle des sons
laisser bondir & rebondir la flèche dans l'arcade
allumer pour voir mieux le festin d'étoupe
observer les esquisses d'Humain
Porc – grognais-tu en appuyant le p en soufflant sur le o
& c'était insupportable – porc – il fallait déborder la jouissance
dépecer la douleur – être en étant plus être en étant autre –
derrière on installe le chant sacré on prie on arrache sur la peau noire ou rose
ce qu'il reste de soie le sang perle &
la voûte se redresse
dans ses voiles le retour autour de ses cuisses
le parfum des demeures ses mains retiennent & congédient
sa bouche est ferment de naufrage ce qui fut est autre autre se multiplie
enchanteresse rien ne retient l'homme – il s'en trouve toujours un
pour naviguer ou voler ou dire – il s'en trouve toujours un pour faire l'Homme
un est une les faits libres se contaminent
les parlants se confondent 
...
 

vendredi 15 avril 2016

150416


la taille est bousculée
voulant puis ne voulant plus être prise dans l'entrelacs
des mains un accord suivi d'une fuite
un monde s'est étalé entre le lièvre &
le ciel au moment où se perdait la conscience
des choses immobiles
sur le lit s'empilent des peaux & des potions
ce que je souhaite à l'instant c'est être la sorcière
non pour le pouvoir dont le cœur ne rayonne qu'accroché
à l'invisible réseau des étoiles
mais pour faire corps – une seconde seulement –
avec la sublime métamorphose qui change
les membres en course les bouches en eau le concept essentiel
en un souffle léger qui viendrait caresser ta joue 
 

mercredi 13 avril 2016

130416


nez collé contre les nuages
route du ciel inversée
un passé qui décroît – fruit trop mûr –
en lui le monde s'engage violem
ment bouscule les venelles –
l'étroitesse des figures l'a toujours
ému & révolté – mon soleil sans fin
où qu'il soit mon soleil invariant
pour les joies & les tristesses
mon soleil qui redoute & menace chaque larme –
la nuit d'anciennes amours s'allument
aux abords d'un vaisseau aux cales remplies de sable
sur le pont la filature des espoirs & de l'extrême
finesse des peaux non pour sentir le pois dessous
mais les plis du réel & de l'autre
sorti du réel – imaginaire guetteur sur le mât sentinelle –
& tout porté par la toile rugueuse
étrange océan gonflé de chaque instant impensable 
 

dimanche 10 avril 2016

110416


corps abîmé corps d'abîme
ruine ailée sous la langue un feu
plein – jeune l'allant flottait
dans les strates irréelles l'éternité
reposait sous les cils – les hommes
sont passés le temps les autres le
premier poignard frotté de thym
& de soleil braillard – oh la
coquille défaite les ans morts –
les ans morts au fond la part tendre
métamorphique avec sa face
amoureuse ouverte à tous les ans
avec son axe tellurique
sa carcasse radieuse

samedi 9 avril 2016

090416


le printemps est là cummings le trompette
la bouche traîne sonde jusqu'au moindre renflement
de manière pressante il s'agirait d'écrire un soupir érotique
qui gonfle à l'instant des civilisations exsangues
ou de pointer du doigt l'exploration de la rosée épaisse
&
place au volume typographique qui prononce l'écrit
le lien la rencontre dans la même aspiration
affine le baiser
très comprenante du moi insignifiant & bavard
à l'image de ces euphorbes qui bataillent dans le fossé
cherchent à exhiber le plus tendre des verts
eh bien partante pour traverser la suite
aux parfaites conditions imparfaites
partante sur le socle faillant pour rugir soi&lemonde 
 

vendredi 8 avril 2016

080416


face partout face à la silhouette lourde
de la masse brûlée son masque
yeux crevés bouche sèche
pan entier de la création arraché à sa buissonnante insouciance
la grimace du ciel entre base & faîte
l'odeur âcre la révolte de chaque alvéole

sous la lumière – la face devient une –
jusqu'à la pluie qui frappe le sol noir
de ses irrévérences – les enfers se dévoilent –
ma route se reprend elle va tout droit vers ta demeure
la file des rochers luit se précipite
elle découvre un fleuve nocturne affamé d'océan

mercredi 6 avril 2016

060416


n'ayant pas connu d'horreur directe collective
mais une condition d'humaine vivant
dans une société démocratique de base
capitaliste de cœur sortie du peuple
comme on sort d'un jeu à face ou pile
de corps d'âme parfois banalement malmenés – âme par ailleurs
très peu divine âme plutôt faite d'iode d'embruns
de morceaux de coquilles coincés sous les ongles –
n'ayant pas n'étant rien – pose l'écrit en forme de socle.
la poésie doit être claire c'est ce que claironne
justement l'écrivain qui n'en écrit pas
en lit sans doute s'accroche aux rideaux
de l'hypocrisie générale tissée du tout doit être simple
simplissime simplissimement simple etc.
l'autre jour dans une goutte d'eau aperçue la cité
des Atlantes rencontrés le temps & sa flèche
destinale aussi le père mort depuis des lustres
le frère pareil la mère encore vive mais
oj'aivu – comme dirait l'autre – ce que l'humain peut voir
le petit très petit – atomes – noyaux – quarks cher joyce –
bosons & autres particules à nom de clown – le grand cirque
qu'on n'a pas encore découvert – celui qu'on ne découvrira pas –
bref ai-je droit de parler moi à qui rien ne manque
en manque de pas grand chose tout pour être heureuse
habitée poétiquement habitée très physiquement
par un vaste trou une absence
un vide – blanc – une échappée – défaillance – fugue – un oubli -
rien habitée par rien d'autre que ce qui habite depuis la grande origine
chaque parcelle de chair chaque joint de mystère
on peut soupeser les horreurs
la mort viendra la vie s'acharne
s'acharne & parle
on a tout le droit de dire tout
on n'y peut rien 
 

mardi 5 avril 2016

050416



traîne toujours à côté du monde
mais le monde est ainsi fait :
à côté du monde on est encore dedans
même en traînant
même en bornant son écrit de réel
défenestré
même en soupirant avec un cœur bouilli
même & même
sans valeur soi égoïste & suspect
même en suspens
même en t'aimant la faille pend
au bord de l'âme

 

lundi 4 avril 2016

040416


trop étroits les mots
une place se dessine qui accueille
l'hirondelle & puis l'autre enfin tout le printemps
sur le fil – il pleut encore au loin – je sais
les nuages font la bête & le vent balance
au sommet de ses bois une esquisse de mort
trop étroits toujours mais dans leur consistance
un monde à faire & à défaire
à marquer d'une pierre blanche
mot & monde à refaire
poète de moins en moins dans le réseau des veines
de plus en plus ailleurs ajouté de là
la traversée est belle
monamour est proche de la place qui
dessine un profil de guet monamour la bâtit les déluges peuvent choir
maintenant sous les semelles s'érigent des ouvrages humains
il pleut – vrai – mais bouche ouverte on saisit
les vieilles impostures qu'on suce & qu'on recrache comme des noyaux 
 

samedi 2 avril 2016

020416



(extrait)

...
qui parle ? de quel droit parle-t-elle ? de quoi ? d'où ?
depuis quel objet noir naissent les structures. forcément. noir.
des mots sont là ou bien ce sont des chants. la fabrique des survies. entre les mots ou les chants
l'étagement complexe des cultures. entre / c'est l'espace dans lequel on tombe
faille décrochement
faille déverbal de faillir vocabulaire minier : le filon disparaît manque a failli
entre je faux tu faux il/elle faut nous faillons vous faillez ils/elles faillent
entre les questions se déforment souvent on n'est plus qu'un corps seul
dispersé qui a failli mourir & demeure vivant qui du vivant
ne sait pas quoi faire le filon disparaît le noir comble l'absence
nonjamais aucun noir ne comble
retour au corps au corps de l'autre
retour aux questions sans réponse
vivre le noir qui ne comble pas vive
retour à l'autre
retour & parle & chante &
plonge les mains dans le cœur des terres 
... 
 

vendredi 1 avril 2016

010416


(extrait)

...
l'indicible revient son dos luit son corps souple émerge des flots présents. on aperçoit de loin ses anneaux qui sitôt vus plongent & réapparaissent plus près plus invisibles. l'indicible ne désire rien d'autre que de ne pas être dit être glissant être mou usant comme les vies de continuelles métamorphoses jusqu'au point où fixe dans l'autre univers il déploie ses morts, qui ne parlent plus, il déploie ses bêtes, qui ne parlent pas, il s'étale en fracas & silence. il jouit de son état confus & de son énorme gueule. se tord dans son autorité de brume & ne craint que le temps qui au fond toujours finit par dire quelque chose. qui dit de couleur. qui dit de chant. qui dit même de mot tout ce qu'il traverse. (rassure les formes les confirme). tout. jusqu'à l'indicible jusqu'à sa traîne d'humains grimés en costume de chose. dit répète redit.
temps bavard temps salvateur — en son sein multiple il laisse la trace du miracle. naissent alors les pavots les bleuets les bouteilles à message qu'une main avant enterra main froide aujourd'hui messages palpitants. naissent les images volées & la rumeur des chaînes qui dans les siècles futurs conquerra goulûment le monde.
les morts ne reviennent pas & c'est le drame. les morts reviennent & rassemblent ce qui doit être compté embrassé haï. ce qui s'extrait des enfers & doit être palpé reconnu sous l'éclat des nouvelles étoiles. 
...