lundi 30 mai 2016

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extraite involontaire du temps & de l'effroi
soulevée par des armées diaphanes de nuages aux refrains de cendre
à côté cela s'est passé sans que ma nuque ne sente
les épines glaciales du vent
sans que les petits cheveux plantés sous l'axe des pensées
ne se saisissent d'un frisson
le souffle bâille – je n'ose plus suivre le frère
j'ose à peine croire son nom & qu'il existe quelque part
monfrèrelesfrères hommes&femmes autres&eux
notre corps qui est au ciel
stratifie-toi d'instants prophètes
& de beautés qu'ainsi entresoi
nous nommerons
chassant le gel des inconsciences douloureuses
étrillant de roses nos terres basses



dimanche 29 mai 2016

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un grand nombre de morts
se précipitent sur nous tous qui
différons mais nous tous dansant sur le même fil
tendu aux pôles des deux crépuscules
une heure passée
je vis toujours
vis&vole dans l'espace agrandi des cœurs
qui n'est pas blanc ni proche d'aucune de ces couleurs à sens
qui pioche aux flaques de nuances infidèles
matière est dite comme la messe – allons
une heure passée
je vis toujours
en pleine peau prêcher allons vers l'assemblage
& les désassemblés le ciel collé
aux brumes horizontales & les mots
croyants chair de nouveaux soleils

vendredi 27 mai 2016

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le sol glisse sous les pas
glisse pluie terre racines
eaueaueau
glisse les pas deviennent liquides
ne s'enfoncent plus ne flottent pas
bondissent d'état à état mollement bondissent dans
l'indicible bonheur des métamorphoses .
les failles se mouillent exhibent leurs langues de clapots
ce ne sont plus des failles ce sont des trous vermillonnants
elles prêtent au monde des organes pourpres gonflés
saouls d'aubes & de jeunesses
qui bataillent pour dire hors
de leurs antres pour aimer hors des coques ornées
que sont les corps d'habitude pour se noyer sans mourir
se noyer vivant de beautés & d'irrésolus
& puis la peau ruisselante qui glisse monamour
glisse contre les mers universelles . ce ne sont plus des failles
& les eaux emplies emplissent monamour chaque grain
de vœu sec

mercredi 25 mai 2016

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ce sont des gerbes des panicules des flots de mousse
dans les buissons les éclairs entêtants d'aubépine & de sorbier
les vies se bousculent les fossés débordent tout
inspire la marche la course le vol la nuée d'ailes de jambes & de pattes
bruissements crevés de cris sexes qui s'ébrouent
les étoiles pleuvent la pluie d'un vert obscur éclabousse
des feux d'herbes mouillées . debout au milieu des cascades
oh brusquement ne sais plus moi humain
quelle est ma place ce qui m'appartient & me désappartient
ce qui me saisit & ce que le monde donne droit de saisir
à ces doigts encerclés d'ombre 
 

samedi 21 mai 2016

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Il s'agit de poursuivre. On décide cela en parfait état d'impertinence car tout a déjà été dit, écrit, tout a été modelé, le moderne a plongé dans le puits du temps, frais soi-disant, croyant remonter l'étoile, celle-là même qui depuis l'aube se pend à la corde de l'aube.
Dans la création s'accumulent nos strates de savoir & d'ignorance. Sous effet de pression & de chaleur, elles se fondent, plissent puis se déplissent, le vent, l'eau, la violence des éléments humains érodent l'édifice. Jusqu'au point d'évider les mémoires, de sabrer les signes, de faire aveugle acte de foi envers le fine surface, de lisser savamment toute profondeur.
Poursuivre, c'est marcher. Arpenter n'est plus tout à fait juste. Nous marchons sans mesurer, la tête abandonne les guides astraux, nous nous perdons, cher Borges !, enfin, sans mesure, nous nous perdons ! La voilà notre chance.
Prions pour atteindre le nombril, l'ombilic, le centre, l'omphalos de l'égarement, l'endroit où ne restera que le monde, à sa racine noire. Si au sein obscur de ce cœur obscur, on survit, aucune certitude de beauté, ni de laideur, aucune assurance de l'existence de la bâtisse, aucune certitude, aucune aucune.
La terre se meut sous nos pieds & nous nous mouvons sur la terre. Tu sais, parfois, l'espoir. Tu sais, parfois, miraculeuse, la rencontre. Mon cœur s'effondre & se reconstruit.
Poursuivre, jusque là, en suivant les vaisseaux capricieux des passions. 


vendredi 20 mai 2016

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midi se pose
encore une fois des choses tues
des mains brûlantes la fillette écrasée
par le poids du sang
les éclats brutaux
à l'intérieur de sa tête
proclament l'humain.
mais la femme se dit ailleurs – tout le corps s'anime
de buissons & de métamorphoses silencieuses – que la douceur
est la plus belle invention du monde
& que ta bouche dans ma bouche
annonce à l'instant sans ombre aucune
l'éternité de cette vie

mardi 17 mai 2016

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le chemin se trace syllabe après syllabe.
sur la part sèche du mont juste à hauteur de menton
la richesse rude se dévoile – des trois emmuraillés
une bâtit son antre de languescorps mêlés
pleur&sang – Minos Bacchus Christ les vieux cultes vifs.
l'étrangère n'a rien à dire – figure l'élément indéterminé
flotte dans la langue de puits & de pierre boit
à l’œil bleu la vieille eau chante le mot parle le chant &
dans sa bouche mâche une salive maigre.
sa poitrine surprend le va-et-vient d'une outre déchirée –
gonfle de l'éternelle course humaine
puis brutalement dégonfle : je suis & demain comment saurai-je si jamais j'ai été ?


 

dimanche 15 mai 2016

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Ce temps-là n'est pas mort.
Il n'est pas endormi sous la terre fraîchement fendue :
des vers tordent leurs corps dans la lumière & la femme
avec un seau mâle les cueille un à un – pêche ou mystère.
Les pays sont vastes & clairement découpés
vu d'ici, vu d'en bas, vu de fausse paix.
Rien ne bouge sous le pas qui bouillonne.
Moi, une seule fois lui ai fait face à elle, défigurante,
& son verre derrière les mots n'avait rien de poli.
Un verre noir, obsidienne, qui tranche les tendons
de l'honnête langue. Depuis, la blancheur
erre, flocon, dans l'univers qui te présente sa merveille,
son horreur dedans sa merveille & toute chose
oblique qui plonge contre elle son grand désir.


vendredi 13 mai 2016

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retour
les deux pieds suspendus
le cul posé sur un lit de fièvre.
retour désir. c'est ainsi que je vois l'horizon
placé dans le mur de pierres. les pierres se délectent de ce qu'elles furent
& de ce qu'elles seront. les pierres se défont.
qui d'autre qu'un mur pour ne voir qu'un mur devant.
l'ange parle inattendu dans sa constance. retour désir.
l'ange montre sa langue. ce n'est pas que les pierres s'envolent
c'est qu'elles bâtissent un autre labyrinthe.
le changement est son cœur ne battant plus au rythme
du pouls noir du minotaure. le changement est
qu'au cœur du labyrinthe se déploie ton sourire.
retour.

jeudi 12 mai 2016

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les mangeurs de pain
les buveurs de vin
les sacrificateurs
trépied fécond des chairs qui chantent
la cuisse ici le sein ici la langue –
voyageurs armés d'une hâte : le retour
même si la terre n'est plus même si les labours
ont usé les reins & si les bœufs ont piétiné le fruit libre
je parle je vis dans la cité du paradoxe je pleure mes mains
bâtissent un temple qui touche de trop près les dieux – perdue –
mon corps perdu – seul bien avide célébrant – réclame l'ignorance du rivage
la vague chargée de sel qui déposera l'aile sur le roc
le retour innocent où la joue touchera ta douceur
quel que soit le ciel – tout empli de nuages ou clair
comme un râle d'été ou dans la brume sœur
la brume familière 
 

mercredi 11 mai 2016

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il n'est pas possible ce détachement sur cette terre.
tous les obliques furent testés & celui-là sans substances
qui colle encore parfois tout ce qui fait mon motif au terrible plafond des insondables.
la survie s'implique jusqu'à l'âme, que je ne connais pas.
bien sûr il y a la poésie multiple & pauvre
l'accouchement douloureux du réel
pour un autre réel, plus vaste, & meilleur ça, qui pourra le dire ?
là loge l'acte de foi.
sur les murs écrire quelque chose comme :
le poème se fabrique. ne plus pleurer sur ce qui n'est pas écrit.
dans les langes de l'infini où la vie se répand
il reste aussi ce frisson
le rehaut d'une naissance
ton baiser
leurs sourires
& les brasiers blancs de mai qui crèvent les bois honnêtes
avec leur indécent parfum de pluie & de miel.


lundi 9 mai 2016

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d'un coup tout se concentre
suspend s'effondre sur suspend
l'épiphanie s'ouvre sans mots
le manteau enveloppe l'arbre & la branche prophétise
tu es né aujourd'hui conjugué au présent
je te retrouve sous chaque paysage qui compose le poème
tu coules au fil du ruisseau imaginaire avec lui tu
arpentes d'insondables dimensions
jusqu'aux confins qui existent sans doute d'une certaine manière
ailleurs où l'univers se dissout dans l'eau pénétrante de l'oubli
que vaut l'instant ? que vaut la renaissance dans l'instant ?
où trouver la longue substance ? entre quels bras poser ses questions ?
les épiphanies s'accumulent mais la douleur persiste
allégée seulement par tes lèvres & Emberiza citrinella
croisé ce matin à l'à-pic d'une frontière

vendredi 6 mai 2016

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ce qui reste : les signes
clairs les autres épaissis par
la forêt cérébrale – un lot d'humains
qui creusent chaque face du temps
ce qui brûle : c'est derrière les mots
l'indévoilable le non-acquis-à-jamais
& les visages – fins grossiers – tous ils meurent à la fin
fidèles à leurs maîtres morts depuis la moelle des temps
ce qui reste
devant : les cités merveilleuses
dedans : l'air dedans l'air la danse orange du pavot 

 

jeudi 5 mai 2016

060516


écrire une parole longue qui malgré tous mes efforts ne pourra te contenir.
des parasites m'ont creusé les os. ma vision se dévide sans appeler de clairvoyance
& ma tête a poussé à côté du corps. un chemin : quand je vois ta peau nue
il m'apparaît intime parcouru d'un pas léger relevant presque du printemps.
sur lui je danse comme sur toi. la vie coule, évidente. quand ta peau fraîchit
& que ton regard tombe, la vie s'écarte. tout chemin se brouille. ma vision
se dévide. encore une fois les oracles meurent. Dodone,
tes chênes sont muets & les plus bavards devant eux perdent désormais la parole.
c'est l'hiver que deux pauvres bras n'ont jamais pu relever de sa neige.
c'est l'hiver & le temps travaille, appliqué, dans la solitude de sa coque.
au fond, complexe est bien le mot même si simple est le désir. simple est
la certitude de t'aimer. complexe la suite des mondes qui mène à tes regards
quand ils s'enferment dans leur immensité bleue. 

 

050516


ici aussi la terre est grasse & somptueuse
les vallées s'échappent des hommes
pour tambouriner devant des dieux hypothétiques leur vieux libre cœur
l'aile grande rencontre l'aile petite sous la cloche immobile du ciel
on croirait la paix une nouvelle fois – on croirait la paix éternelle
il y eut à cet endroit d'autres hommes qui soufflèrent dans des flûtes d'os
qui firent du commerce & des guerres
mais sous les parois enfouies ce qu'il reste :
un cheval brisant le roc le rêve de jardins furieux
&puis
le temps qui glisse sur la matière sage des collines
le même qui pousse sa force tendre sur le dos silencieux de ta main

mercredi 4 mai 2016

040516


l'étrange sensation de plonger en eaux profondes & familières
profondes
familières
alors que tout ici est ailleurs & que les violences sont couchées
sous les fagots bavards – sur le fil des saisons des feux sont allumés
les branches brûlent mais les cendres sont froides
plus de vie à risquer à dire ou lire le poème
cela bien sûr on ne le regrette pas . les portes fermées sont peintes
ouvertes . l'oiseau aveugle les croit à travers elles
s'évade & vole dans un ciel plat gris qui en son centre
ne vit que d'effondrement .
alors bien sûr on ne regrette pas .
le corps vivant reconnaît la source
étrange
familière
il plonge & s'abreuve
de mots porteurs des premières promesses
c'est ainsi : chaque verbe dressé recherche la courbe incertaine
qui prendrait la forme splendide d'un incertain amour