mardi 29 septembre 2015

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la mort est si proche
& la succession de l'automne se blottit à la manière
d'une bête blessée dans la nuit de quelque broussaille
tout devrait être froissé & glacial
mais il y a l'éclat innocent de septembre
qui prépare tendrement le terme & l'espoir fuit toujours droit devant
fuit s'obstine –
elle
s'éteint amère demain ou plus tard
elle
éteint les lumières d'un noyau qui fut bonne ou mauvaise famille
alors que tout ainsi s'écroule on voudrait bien rire & danser
on voudrait aimer encore une fois juste pour user plus loin ce mot & ce mystère
& puis – vaste programme – on voudrait foudroyer chaque complot bavard
mais – rien –
le temps
passe
le temps
passe 

lundi 28 septembre 2015

28915


la part de l'hôte –
une langue attachée – des fragments cousus
qui dessinent à la fin un pays – fragile & austère
des tessons de pain dans des brisures d'eau
la fragilité des liens que le temps souffle sans une faute
& les croyances en flots qui noient le rescapé
& le ressuscitent plus loin dans d'autres mots & sur d'autres rivages

dimanche 27 septembre 2015

27915


parfois ça coule limpide
& parfois ça grince opaque
avance laborieusement poussé par des forces obscures
derrière ou devant d'obscures joies ou
d'obscures tristesses
enfin il n'y a rien à comprendre
on boit le point ou l'infini
on boit les amants & les déchirures
on boit au gobelet des morts
une eau claire & une eau de nuit 

samedi 26 septembre 2015

26915


chaque jour en fiction au bord du gouffre
vieovie
premier jour d'été
sur le chemin lumière & chaleur
solitude d'enfant missionnée de
quelque chose –
le gouffre est d'abord tombé sur la petite tête
épaules cœur & puis sexe & jambes
pendant l'instant-éternité tout un corpsgouffre
plus en vie & non morte
pas morte & plus en vie
depuis le gouffre a bondi l'animal farouche
du cri – sa gorge était frottée de thym – a emporté l'enfant répandue sur
la route l'a posée au présent seule si seule de toutes ses particules contre
& debout la matière flasque des futurs étés 

vendredi 25 septembre 2015

25915


toutes ces histoires
fils soyeux à la patte
toutes à l'aube grêlées de vide & de
poussière. elles s'allongent mais caressent à peine –
toutes – leur temps s'écrasent contre
des blocs & des blocs stratifiés de manques
infimes ou géants & claquant sur leur bord
des mâchoires absentes
sur leur bord les êtres encore chauds
toutes pour s'y faire
mais on ne s'y fait pas
depuis le premier souffle
contre les morts qui chevauchent
leurs boucles d'années-lumière & tombent
en paquets clos & silencieux
devant la porte après l'avoir marquée
d'un mot & d'une croix

jeudi 24 septembre 2015

24915


ça commence par une goutte qui tombe contre
un jour d'avril le carreau gris d'une
fenêtre de chambre – une fille lui est heureux
elle bon on fera avec elle dit ça dans son silence
contre il pleut il faut bien la nourrir contre
petite bête rose on la nourrit –
maman est une bonne maman maman
est une bonne – une fois elle a volé
du tissu pour vêtir sa fille & ses fils
l'autre fille morte n'en avait plus besoin
les gendarmes l'ont arrêtée parce qu'une riche
dame l'a vue a déclaré que les pauvres on les comprend
d'accord mais si on laissait faire dans le quartier
devant on n'a pas parlé derrière il y a eu des pelletées
sales de mots maman est revenue
elle s'est mise à boire on s'est vêtus de vieux – une bonne ma
man avec sa badine elle fait entrer
l’Église par les mollets & le soir
raconte des histoires de sorcières
alors moi j'ai peur du noir & de la bonne maman
qui jamais ne m'embrasse alors oui obligée je suis
contre elle mais sans savoir trop
comment

mardi 22 septembre 2015

22915


nos vies à glisser tanguer l'une contre l'autre
tu dis avoir compris – aujourd'hui tu ne dis plus que des regrets –
& moi rien ne comprends rien au monde moi demeure hébétée dans
ma demeure stupéfaite & seule entre ces ombres aimées – tant aimées
qui gravitent autour & que j'aime – mes tendres ombres –
nous avons glissé l'une&l'autre en cette lignée de femmes
mère&catastrophe – glissé jusqu'au bord où le gouffre nous
avale chacune&deux fécondées de gouffre –
chacune&deux – seule&seule –
oh mes ombres aimées ! seule contre lui – aujourd'hui
dans tes regrets dans ton corps souffrant dans ta fin interminable
aujourd'hui sans espoir moi hébétée incapable de dire incapable
de croire flottant cherchant désespérée deprèsdeloin la preuve
d'une substance humaine dans laquelle seule&seule
nous pourrions ici nous bercer 

lundi 21 septembre 2015

22915


des bruits d'enfance accrochés au vent
traversent la chambre fragiles & tenaces
ils sont une coupe sonore à laquelle s'abreuvent
des lèvres vieillies autour bougent le monde
obscur les autres collés à leur énigme
tout est fumée dit l'Ecclésiaste dans le brûlure de son chant
résonne le souffle de la chambre légère
aux carrefours gonflent les impressions &
le cœur y perd bel&bien le reste parce
qu'au milieu des collines apparaît soudain
un parfum iodé d'horizon

dimanche 20 septembre 2015

20915


tout doit être clair – disent-ils
le beau doit traverser sans obstacle les larges plaines de la tête
de ta pointe, poème, tu toucheras le plein cœur ou la pleine raison
tu éduqueras ton prochain, tu porteras les bonnes chaînes
& respecteras les structures
sinon on se perd dans l'arrière-chaos
où s'ébattent dieux
bêtes qui parlent
formes informes
noms bégayés
sinon on pille les tribus pour s'ensemencer d'ombres
sinon quoi ? une terre humaine engrossée de questions

vendredi 18 septembre 2015

18915


...
& les immobiles – soi-disant –
tortillant leur tapage autour de drogues archaïques
hosanna dehors
hosanna le poing
sang pur
dieu pur
à la sortie des temples
enfants clairs
dépouillés d'innocence 
...

jeudi 17 septembre 2015

17915

...
en chantant d'abord nous l'avons bâti & nous j'ai
juré devant les cieux : celle-ci est la plus belle
le chant tombe – la nuit tombe – celle-ci est vérité
quand nous hurlions cela sous nos pieds le travail
minuscule des forces muettes nous ne le sentions pas
parce que nous hurlions & je & nous étions tout entiers
dans le cri le chant nous l'avions déposé avant
empaqueté dans un lange d'étoupe noire
mal-né mourait le chant 
...

mardi 15 septembre 2015

15915


le mouvement limpide
de tes lèvres quand nous avons fini
d'attendre & que le ciel – heureux –
nous suit – contre désespérément
l'un&l'autre sans aucune idée du chemin
vient en écho des transparences
automnales qui font table rase dedans
on n'est plus qu'une immense plaine du soir
les couleurs en nous se mêlent & les autres
sont loin contraints de haine & de violence
l'horizon prend teinte de roses sèches
qui juste avant la nuit s'enflamment
puis nous avons fini d'attendre &
pour nous & nous seuls au monde
naît la première étoile 

lundi 14 septembre 2015

14915


ce sont de petits signes
accrochés les uns aux autres
ils faillissent sans grandir
aux lois de la croissance
le premier se gare loin du monde
façon de parler parce que loin
c'est toujours dedans
loin&dedans – extravagant non-ermite
loin des nouvelles & dedans la première qui fut :
me voici humaine te voilà humain (prononcé à voix haute)

le deuxième ne sait pas trop où se rendre
ni s'il est attendu il rêve d'être aimé
parce que la vie ne vaut rien sans amour
comme dit la chanson comme dit le prêtre
comme dit la pub à la télé comme dit maman
il rêve de toute sa possible délicatesse
d'une main à tenir d'une bouche à baiser
& du reste d'une vie plus douce quoi
d'une vie meilleure merde on a bien le droit
sinon hein ? -

le troisième est dedans jusqu'à la couronne
les mains dedans la sueur dégouline le long
de son dos il trime il guerroie il conquiert
il prend femme de gré ou de force il
parcourt des lieues laisse derrière lui
des pays de sang & de langue nouvelle
depuis l'aube c'est ainsi entre
ses cuisses la semence & le pouvoir
dans sa bouche l'autre l'étoile qui légèrement
glisse hors de son image brasse une autre pensée
la file bouscule ses croyances vieilles il tombe
sans savoir s'il pourra se relever dans ce monde
désormais très distant des débuts
& bien étrange –

le quatrième est la quatrième
non exclue même très couverte
empaquetée humaine insaisissable
humaine chair&vie réseau complexe
de pensées & de désirs parce que dessous
humainehumainehumaine 

samedi 12 septembre 2015

13915


je déteste les certitudes autant qu'elles me détestent
dans ce monde bon an mal an nous cohabitons
le geste sage m'ignore & je ne connais pas le geste sage
il n'y a que la justice des hommes l'imparfaite la grise
il n'y a qu'elle & je voudrais que dieu gouverne tout mais
dieu n'existe pas mon désir pioche un gouffre le fait est :
me voici qui parle & certains font de belles choses
me voici qui parle & leurs paumes grainent
aussi bien le monstre que le saint
alors moi qui suis moi & rien qui parle que puis-je
sinon exhaler de cette façon l'ignorance la candeur la folie
d'un chant d'une onde d'un battement d'un poème
me convaincre qu'ainsi l'univers s'épand par ma bouche
dérisoire & qu'ainsi humaine mouvementée mouvante
qu'ainsi par là passe l'étoile & son inverse 

vendredi 11 septembre 2015

12915


étendue sur un fil
la populaire
la canaille
la chanson déguisée en
j'aimerais vous conter l'histoire de
celle-là qui fut fille puis femme
ne conquit rien & que rien ne conquit
mais dont la voix parcourt – ici
la nuée l'insaisissable
parmi vous renversée
sur les étals de sucre & d'orages
la parole charmée ou sauvage
qui fit du bidule le Grand-ça


jeudi 10 septembre 2015

10915


ce n'est pas mon âme qui balance là
comme un lourd rideau devant la fenêtre entrouverte
peut battre contre ou avec le vent
c'est un vent indécis d'entre deux saisons
tantôt frais tantôt tiède
si bien que le corps s'approprie
toute l'attention : une veste ? la peau nue ?
chasser la mouche qui entrée par le petit espace
agace l'esprit veut : chasser son bruit ne laisser pénétrer 
du dehors que le pincement d'un chant d'oiseau

où la tache grasse d'un nuage
& se baigner dans l'état d'incroyance
qui fatigue faut l'avouer un petit peu
c'est un temps de doute ni plus bas
ni plus haut qu'un autre 

mardi 8 septembre 2015

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perdue loin depuis toujours
dans la géographie d'un corps dessiné d'autres corps étranges
naufragés errants sans issue mouillés de violence
aimantée par les bruits étouffés de ventres lamantins
vieilles sirènes mâles
parfois échouée sur la vague d'un spectre
aux deux mains jointes cardinal assoupi
sur des lambeaux de chair & charité crachée par le trou de tribus
familières desséchées aboyantes
pour tout dire sur le chemin des morts