mardi 29 mars 2016

300316


je ne pouvais m'endormir ce soir
sans simplement te dire
que la première hirondelle vue tout à l'heure
dans les collines, entendue avant d'être vue,
celle qui nous a salués à sa manière qui ne fait aucun printemps,
m'a trouvée là, penchée, moi qui ne fais que du temps de vertige,
penchée fermement sur la terminaison de mars & sur le début de tes lèvres
un peu pâles aujourd'hui, il est vrai, l'hiver pose parfois ses prières
de neige dans la faille mystérieuse des chairs, parfois te souviens-tu ?,
& si simplement qu'on peut m'en faire reproche, sur tes lèvres je pose
une espèce de poème, poème d'amour, je ne vois rien d'autre à poser
sur leurs lignes presque parfaites, ni sur le vol presque parfait de l'hirondelle,
qui n'a fait ne fait ne fera, sauf sûrement ici,
entre nous & l'espace sans cesse étréci qui sépare nos corps,
aucun printemps.

290316


(extrait)

...
raclement de fer & de roc / partir de force / abandonner l'allure des vents / de force / contraint / quitter l'amour
renoncer à la douceur / les chevilles libres les trancher les laisser pourrir sous la blancheur des voix /
mon père ma mère très loin / leurs yeux roulent ailleurs / ma femme /
ne m'attendra pas / mes enfants m'oublieront / je mourrai sans mort
& chanter / pourquoi / pourquoi traîner les signes du néant dans le siècle ?
dans les corps incarcérés / vide&vide / plus forte est la balance / plus fort est l'appel mat
du cœur / bambampam / le présent lance ses fouets
indétectables bâti lui&lereste devant
les joies les peines les joies les éblouissements qui naviguent sur d'autres routes
les peines les joies les feux l'honnête froideur des étoiles
ma mère / je mourrai ici & sans histoire /
d'autres chanteront & connaîtront le monde /
moi disparu depuis l’œuf le monde me chantera
...
 

lundi 28 mars 2016

280316


(extrait)

...
ohoh
le monde est bleu
chaque angle est bleu
bleue chaque courbe
bleu avalant le bleu
& basculant si profondément dans sa question
qu'il touche des ailes noires sous lesquelles
dorment étoiles & fleurs
certaines glissent dans les étangs gras certaines s'envolent
vers l'espace dédaléen des amours
mêmes racines même mystère
ohoh
toujours l'autre pour enlacer les portes invisibles
de son corps béni de sa langue bénie
toujours l'autre pour
les ouvrir

...



dimanche 27 mars 2016

250316


(extrait)

...
tout ce que je ne saisis pas se rue dans l'absence.
alors que veux-tu que je fasse ? je saisis tout.
un amour chaque soir. après je
disparais. le sang toujours rempli de drogue & d'éphémère.
après je disparais. entre mes doigts ou sur ma langue
ou dans le temple du corps résonateur
création en sept jours des suites cosmologiques. après
je
dis
pa
rais. 
... 

vendredi 25 mars 2016

250316


(extrait)

...
enfait
ce qu'on voudrait c'est chaque soir une 'tite dernière histoire d'amour
chaque soir une pour faire la bouche qui tremble & le cœur & la main &
enfin tu vois quoi. moinsseulmoinsmort.
c'est pas une beauté que je cherche.                                                ( je ne cherche rien )
je désire le corps qui rencontre le corps le détail qui obsède
poser ma chair sur celle d'une terre vacillante il suffit qu'elle
s'ouvre d'une odeur d'un sourire qu'elle découvre
une dent ou que sa voix soit couleur de nuit. couleur de paume qui caresse. 
...


jeudi 24 mars 2016

240316


(extrait)


n'empêche –
que même avec tout le talent du monde le talent du temps qui pousse
partout dedans qui décuple & sidère même avec –
faut en abattre des masses d'heures des masses d'oreilles des masses de verres
sinon le talent – que nouille –
le talent se noie au fond d'un glass
collé au cube cliquette contre la paroi lisse
reflète les derniers rayons d'un ambre électrique
&puis gloup
avalé pissé sur au mieux la lézarde d'une antique porcelaine
au pire en dédicace sur le mur salpêtré en fond de cour
ou à l'horizontale flaque dans un froc même pas ôté froid
mortel & froid o si froid froid éternel & vertigineux silence

...
 

mercredi 23 mars 2016

230316


sans mentir
du fond des caisses à l'endroit des ventres & des moiteurs
là où ça croît en clandestin – les lumières sont étranges
on les prend pour des rouleaux noirs
compresseurs d'espace –
la cité tout entière doit tenir dans le volume des chairs
gonflées de quelques brassées d'ondes – musika on dira
sans y toucher parce qu'il n'y a qu'ainsi sans y toucher
que les révolutions s'affaissent & glissent sous les portes
remontent les artères finissent avec l'alcool adjoint de cieux annexes par imprégner le cœur – pharmakon
les enfers grouillent de beauté
la beauté croque chaque Diable 
recrache peaux mots & sons
… 

mardi 22 mars 2016

220306



alors c'est comme ça
des os qui s'entrechoquent
sur terre & dans le Texte
se heurtent jusqu'au — silence
— plus dieu à dire —
alors débarque un grand besoin de joindre l'autre
dans sa propre petite chaleur
mais l'autre — c'est comme ça —
il arrive que l'autre soit très loin


lundi 21 mars 2016

210316


le socle est mouvant
en cherchant mes racines pour déclarer l'araignée tisseuse de pluie
les fils de vierge le nuage qui enlève l'enfant
pour déclarer moi mouvance du mouvant
je n'ai trouvé qu'un passé chu depuis la margelle
dans l'absence du puits
plus de père plus de frère une mère dont la tête ne cesse de tomber
l'océan ah l'océan qui n'est pas une racine ni un passé qui est vif
chronique transcendant rempli de sirènes & de naufrages
cracheur de croix ou de cadavres que la vieille chapelle n'abrite plus
pas de place on a fait une belle esplanade touristique propre sans morts
en été joliment fleurie
enfin l'océan on ne peut pas s'y fier ça flue & ça reflue
pour résumer : socle noyé – tout est devant
tabula rasa niet car il n'y a plus rien à raser – tout est devant
& Dieu dit quel bien ! car devant devant devant il y a
toi toi & ton ombre ton ombre toi
toi toi

vendredi 18 mars 2016

180316


il fallait qu'à ce moment précis je dise quelque chose d'essentiel
mais à ce moment précis l'essentiel s'est dilué &
la parole est morte. l'essentiel foudroie par son inexistence.
le beau texte plonge. le joli texte se noie. tu parlais du cri.
insuffle dans la couche écrite ceci – l'impossible. courbe l'arc des mémoires.
je chanterai & ne cesserai plus. debout & nue
devant le ciel & sur la terre. le chant débordera le chant
baisera le corps des joies & celui des douleurs.
plus d' obstacle pour t'aimer : je suis blanche aujourd'hui
aussi blanche que la première croyance
& toutes les paroles restent à construire. 

jeudi 17 mars 2016

170316


c'est la grande affaire du corps & de sa rupture –
parfois – de la rupture – rien qu'elle puisque le corps
se terre dans un passé fangeux aussi faux que tous
les passés peuvent l'être.
la rupture a un exclusif amour d'elle-même. amour moignon sourd aveugle sans peau.
les oreilles sont à chercher du côté du cœur
qui ne rompt pas, celui-là ne rompt pas –
le cœur est à chercher du côté des yeux –
tes yeux mon ciel le pur le plus profond.
enfant, minuscule chose étrangère, il m'effrayait ce
ciel d'été sans bornes infini ciel énorme lourd où
la seule issue était – je le croyais – de se perdre
d'y laisser ses membres & sa raison. combien de fois
écrasée par le ciel son infinie passion cosmique.
combien de fois morte en lui. combien de fois retenue par le cri.
combien de fois je signais perte en hurlant abandon.
tes yeux mon ciel le pur le plus profond.
comprends ces soubresauts, ces restes de vieille machine.
comprends que patience, le corps revient à lui,
te reconnaît & s'engage sur des terres nouvelles
où la tendresse serre chaque buisson brûlant
contre sa poitrine.


mercredi 16 mars 2016

160316


d'un coup toutes les portes s'ouvrent
toutes les feuilles frémissent
toutes les bouches parlent
chaque détail devient signe & fracas

ce qui est là sans faillir – l'éblouissement
la trame lumineuse –
le murmure persistant
dans le cœur enrobé d'écorce

tout à portée d'un corps d'une âme
tout à portée d'une parole qui plonge
l'étoile dans le corps qui fait l'âme
tout porté de matière qui crie contre néant

les membres se dressent & la nuque
sa courbure fragile prend forme d'une lune
pâle inachevée de sa silhouette épousant
faiblesse & force des hommes qui

ne connaissent rien – moi je ne connais que toi
& ton sourire & tes yeux dans ton sourire &
la suite des mystères qui font s'épanouir
chaque oracle & trembler chaque rameau

lundi 14 mars 2016

140316


ta présence
un volume organique pétri de langue & de tendresse
ta persistance
empreinte de colline torse clairvoyante nudité la plus belle des rencontres – tout se bouscule – tout s'enlace – sensations – membres – racines
perdue sur le chemin des habitudes nageant à cette seconde parmi les atomes légers d'un amour
charmée au point de laisser choir toute métaphore à la lisière d'une autre aventure
je fus soudain frappée par l'apparition d'une troupe de chevreuils
six-sept au carrefour d'une prairie & de mes désirs
& puis juste après le tournant surgit le chêne avec son peuple de rameaux grand gazouilleur de choses infimes qui transpercent si puissamment le granit du ciel
une respiration un souffle bourgeonnant de mille parcelles jaillissantes
& toi de nouveau présence
persistance clou délicieux planté dans la couche subtile des chairs 

jeudi 10 mars 2016

100316


le matin où la mer se retire
– grandes marées – jamais vu autant de terres couvertes / jamais vu autant de terres vides /
jamais vu autant de regards affraîchis
en ces lieux mouvants drapés de strates irréelles de vastes oiseaux apparaissent becs fantômes pattes spectres ligne étirée vers
la double attitude de l'immobile & du flottant
& dedans innombrables furtifs des corps non formés des corps de défense ou de fatigue
des corps bâtissant un seul rivage
monamour
sanctifié par nos lèvres
jamais sur terre autant de choses vives ni de désir sous chaque roc 

Lecture de ce texte ICI

lundi 7 mars 2016

070311


rien ne conservait sa forme propre
surtout pas la mémoire qui gonflait
dans l'humeur invisible de la matière tue
& se vidait par à-coups de tempête désenchantée

le monde flottant flottait
ne trouvant nul appui durant ces périodes de grande attente
flottait surtout là en ce
qu'on ne nommait pas encore

été                    & particule – moi
particule de particule – enfant moi
ne comprenait du monde qu'un chemin
dont la trace à venir s'incluait dans hier

un chemin où je te rencontrai toi – particule d'autre – promis de paroles –
toujours plus complexe que ton ombre
où nous se formait
remplissant l'air de la lumière absente 

dimanche 6 mars 2016

060316


pas écrire pour l'équilibre pas écrire pour sauver pas écrire pour
écrire une inclusion de vivre écrire pas pour
écrire sur le dos du bison qui court
écrire sur la paroi avec la flamme du premier feu
dans le prolongement du corps écrire à la trace
sous la voûte de la voix sainte & première
écrire par coulée de cendre & d'étoile

samedi 5 mars 2016

050316


l'exil sur les fronts bleus – l'échappée des nuages /
de la poésie vraie à c'qu'on dit de la poésie vraie
pas savante mais vraie qui sort de la bouche des rues
& des gensses des vrais pas des faux des gensses
qui ne parlent pas rendre la poésie aux gensses la rendre
la rendre sur le pavé la rendre entre deux sexes la rendre –
l'exil sur les fronts bleus – l'échappée des nuages /
du mot porteur de pavé lisseur d'écrou du mot raide
du mot cru pas de jonquilles du mot de cul pas
de narcisses du mot quotidien quotidien le mot
parlent toujours ceux qui parlent parlent toujours les mêmes
s'adressent toujours aux autres du temps qui parle
oukase & haine enchaînés – jonquilles narcisses
le verbe au vent s'accroche aux déroutes du bitume
& quoi qu'elle dise qu'elle puisse être
la poésie s'arrache jusqu'aux lieux du motif qui se métamorphose
l'exil sur les fronts bleus – l'échappée des nuages /

jeudi 3 mars 2016

030316


en fait je dois vous dire —
je sais qu'il y a bien du malheur dans ce monde
parfois j'y vais j'en pleure quelque fois même il s'est invité dans ma chambre
oui & loin des plaintes – sèchement dedans —
pour vous dire à quel point nous nous fréquentons
& à quel point du poème de malheur il y en aura éternellement à écrire.
mais voilà ce que je veux vraiment vous dire
c'est qu'en cas de grand amour qui pourrait présager
d'un très grand bonheur le poème toujours se présente
& que c'est une sacrée belle découverte qu'il puisse encore
s'écrire quand tu m'embrasses de cette manière


SON ICI (CLIQUER)

mercredi 2 mars 2016

020316


&puis

le monde – peuplé de laborieux sédentaires
très concentrés sur les fourches aveugles de leurs toits
pas bouger – ça implique une absence de marche
un néant de pas la conviction du silence absolu
d'un bienfait qui viendrait de là.

or des hordes. des hordes de tanguants.
des hordes d'exilés. de marcheurs. de boiteux.
d'infirmes chancelants. des hordes & des hordes.
qui portent des noms mauvais de choses mouvantes
vents flots espoirs guerres amours même montagnes –
qui sous chaque nouvelle lumière se détendent d'une course –
même morts qui arpentent les ruelles rouges des vifs –

les immobiles – lisses exils d'humains –
s'effraient lacrymogènent se ratatinent
contiennent poussent condamnent
accusent
justifient
s'exécutent
les immobiles meurent comme les autres
mais d'une mort plus mortelle

car le chant des passants les odyssées terribles
l'océan les déserts les pleurs les membres arrachés
les fuites les hasards les destins
car la force des hommes déplantés le cri élémentaire
sur lequel s'engrainent les possibles
car ce pas minuscule qui suffit pour que les îles s'ébranlent

ou le hurlement d'un seul – miracle hébété –
parlant la langue errante l'unique des humains 

 

mardi 1 mars 2016

010316


& puis j'aurais aimé écrire en langage sale
(viens d'apprendre que Dan Fante & sa grosse
barmaid relève savamment du réalisme sale) ohoh
ça oui écrire comme ce côté-ci du monde – bon –
la nature & le reste ont fait que j'écris de ce côté-là
propret mais bordélique je dépendrais donc plutôt
d'un mouvement qu'on pourrait qualifier comme ça :
bordélisme soigné ou pas de mouvement du tout
ou du seul mouvement qui déborde toujours
ce qui entreprend par moi de penser parler aimer
en ce moment & pour longtemps c'est toi qui
déborde
monamour
inclassable
déborde ohoui & bien souvent salement bien

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